Signatures génomiques de l’isolement géographique et de la sélection naturelle chez les poissons de récifs coralliens
Les moteurs de la spéciation restent parmi les sujets les plus controversés de la biologie évolutive. Initialement, Darwin a mis l’accent sur la sélection naturelle comme mécanisme principal de spéciation, mais les architectes de la synthèse moderne ont largement abandonné cette vision en faveur de la divergence par isolement géographique. L’équilibre entre sélection et isolement est toujours au premier plan du débat sur l’évolution, en particulier pour les océans tropicaux du monde où la biodiversité est élevée, mais les barrières d’isolement sont peu nombreuses. Ici, nous identifions les moteurs de la spéciation chez les poissons de récif du Pacifique du genre Acanthurus par des analyses comparatives du génome de deux populations périphériques qui se sont séparées d’une grande lignée du Pacifique Centre-Ouest à peu près au même moment. Les séquences mitochondriales indiquent que les populations de l’archipel hawaïen et des îles Marquises se sont isolées d’environ 0,5 Ma. La lignée hawaïenne est morphologiquement indiscernable de la forme pacifique répandue, mais la forme marquisienne est reconnue comme une espèce distincte qui occupe un écosystème tropical inhabituel caractérisé par des remontées d’eaux, une turbidité, des fluctuations de température, des proliférations d’algues et une faible couverture corallienne. Une analyse de 3737 SNP révèle un signal fort de sélection aux Marquises, avec 59 loci en sélection perturbatrice dont un locus opsine Rh2. Alors que les populations hawaïenne et marquise indiquent toutes deux des signaux de dérive, la première montre un faible signal de sélection comparable aux populations du Pacifique Centre-Ouest. Ce contraste entre des lignées étroitement apparentées révèle une divergence de population due principalement à l’isolement géographique et à la dérive génétique, et l’autre atteignant le statut d’espèce taxonomique sous l’influence de la sélection.